Cours en ligne N°10
Université ABOU BEKR BELKAID Tlemcen Faculté des sciences humaines et des sociales
Département des sciences sociales Filière : Anthropologie
Cours de Français en ligne
Destinés aux étudiants de Master1 Anthropologie sociale et culturelle
(2ème semestre)
Cours N°10
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« La religion » et « le fait religieux » : deux notions obsolètes culte». On lit souvent que «religion » dériverait de religare au sens de «relier» (au sacré), mais Émile Benveniste a démontré que c’est impossible du point de vue linguistique; ce mot vient en réalité de re-ligere, où le verbe ligere signifie «recueillir, ramener à soi, reconnaître». La signification originelle de religere était donc «recollecter» au sens d’« avoir souci, être porté au scrupule». Religio, c’est l’attention scrupuleuse, à laquelle s’oppose la négligence, puisque religere est le contraire de negligere .
En outre, l’histoire du terme est indissociable de celle de la «superstition» à laquelle les Romains puis les chrétiens l’ont opposé, ces derniers distinguant de plus la « vraie» religion, religo ueri dei (la leur, unique, vénérant le « vrai dieu »), des «fausses religions» (celles des autres, plurielles, adorant «idoles» ou «faux dieux ») . Les Latins considéraient les premiers chrétiens comme porteurs d’une «superstition déraisonnable». Pline le Jeune, enquêtant sur eux dans les premières décennies du second siècle, écrivit à l’empereur Trajan que « ce n’est pas seulement à travers les villes, mais aussi à travers les villages et les campagnes que s’est répandue la contagion de cette superstition » .
Le christianisme sera encore qualifié de «superstition funeste» par Tacite, et Suétone regardera les chrétiens comme une «sorte de gens adonnés à une superstition nouvelle et malfaisante». L’accusation n’est pas légère, car religion et superstition étaient alors considérés comme totalement incompatibles, et leur relation était, littéralement, celle d’ennemis mortels. C’est donc un véritable coup de force qu’opérèrent les premiers auteurs chrétiens, à commencer par Tertullien, en retournant cette opposition et «en déclarant que, désormais, la religion romaine est ravalée au rang de superstition et que le mouvement chrétien, considéré par les Latins comme une superstition, est non seulement une religion, mais encore la religion, c’est-à-dire la vraie (uera) religion ».
S’étonnera-t-on de retrouver des échos de ce renversement jusque sous la plume de Durkheim, qui opposait «la magie puérile des Australiens ou des Iroquois» à «la vraie religion », celle qui se trouve « au plus haut point possible de son évolution », telle qu’elle se manifeste par les «formes les plus épurées du christianisme» ? Un mot intraduisible ? S’intéressant à la «terminologie des sciences des religions», Lionel Obadia a évoqué ce qu’il appelle «l’intraductabilité de la notion de religion»
. Effectivement, les mots de cette famille —religion, religieux, religiosité—, posent problème, tout comme le couple «sacré/profane» qui sert si souvent à les gloser. Tous ces termes sont régulièrement employés comme s’il s’agissait de faits universels, au sens évident, qu’il ne serait pas utile de définir. C’est pourquoi, par contraste, il est très intéressant d’examiner les façons de dire «religion» dans diverses langues.
L’Anthropologie pour tous Jean-Loïc Le Quellec
Questions :
1- Donnez un titre au texte ?
2- Quelle est l’idée générale du texte ?
3- Quelle est la définition de religion selon ce passage ?
4- Existe –il une différence entre religion et fait religieux ? si oui , laquelle ?
5- Quelle est la signification du verbe « ligere »?
6- Ecrivez un résumé de 15 lignes au maximum en reprenant les idées phares de ce texte?